mercredi 20 novembre 2013

La valeur de l'oeuvre

La qualité d'une oeuvre, du point de vue de son auteur, ne se quantifie pas. Les chiffres de ventes, le nombre de "J'aime" sur Facebook, s'ils mesurent l'engouement que suscite un livre dans le public, ne doivent en rien être interprétés comme des réussites d'un point de vue artistique.

Puisqu'il existe un art d'écrire, il faut bien le défendre un peu! Et cet art ne trouve son chemin vers le lectorat qu'au moyen d'une mise en marché pouvant être efficace ou non. Ainsi, le nombre de copies vendues relève au moins autant (sinon davantage!) de la place qu'occupe le livre sur la tablette du libraire, de la couleur sur la page de couverture que du contenu des pages.

Or l'art littéraire se trouve dans le contenu, qui est un mélange de fond et de forme, inextricables et aussi révélateurs l'un que l'autre, du fait que la seconde est en somme l'expression du premier. Une oeuvre se bâtit à coup de choix esthétiques : un rythme, un lexique, l'originalité d'un point de vue et l'organisation des idées.

Quand on écrit, on se fixe des objectifs qui vont bien au-delà de l'aventure qu'on met en scène. C'est pourquoi, pour un seul sujet, il existe des milliers d'histoires. Le défi réside dans la difficulté de ne pas tomber dans les clichés. Tout peut être dit, mais encore, il y a la manière.

Avec Qu'est-ce qui fait courir Mamadi?, je voulais un roman de survie, un roman lumineux et émouvant, une ode au courage. Je voulais un livre qui se lise comme une course folle, un livre qui essouffle par la rapidité avec laquelle il se lit. Je voulais une voix, le souffle d'un conteur qu'on entende à la lecture. Eh bien! Je pense bien avoir réussi! En effet, tous les commentaires reçus jusqu'à présent soulignent ces faits.

Je ne voulais pas d'un roman de misère, bien qu'elle soit au coeur de ce livre, la misère. Ç'aurait été trop facile de dépeindre la dureté de la réalité des camps de réfugiés africains et c'est, selon moi, dépourvu d'intérêt. Les journaux existent pour ça. Il m'est arrivé de lire des livres qui font un spectacle de la souffrance et qui s'efforcent d'en montrer la monstruosité. Mais ce genre de texte passe à côté de l'essentiel : on survit à la misère. Voilà pourquoi j'ai pris soin de traiter cet aspect avec un maximum de pudeur. J'ai préféré une forme de lyrisme ou de poésie à la cruauté de scènes plus réalistes dans les moments les plus choquants.  Après tout, il y a de la beauté dans tout, aussi bien le souligner! Il y a, de partout et de tout temps, des gens qui survivent à la mort à force d'espoir et de sourires. Je voulais que ce soit ça, Qu'est-ce qui fait courir Mamadi?, et c'est précisément ce que j'entends des gens qui l'ont lu.

En outre, je n'ai jamais mis les pieds en Afrique, ce qui ajoute au défi de mettre en place un univers crédible. Il a fallu mettre en place un univers de mots et d'images récurrentes qui traduisent la chaleur, la moiteur, la végétation, les odeurs, le temps qui s'écoule. Et ça passe. On semble y croire.

Les objectifs littéraires semblent bien avoir été atteints. Et ça me fait comprendre que cette oeuvre, à mon point de vue (faut-il le souligner une fois de plus?) est solide. Mamadi, et son histoire, existent. Ce qui me remplit d'une très grande fierté, bien sûr. 

Bref chacun des mots des lecteurs émus par la beauté, le courage, la voix de Mamadi vaut beaucoup plus que des copies vendues, parce qu'ils renforcent mon idée qu'il s'agit d'un livre réussi.

Et si les ventes ne sont pas au rendez-vous? Peu m'importe, ces quelques commentaires me fournissent la garantie toute personnelle qu'il s'agit déjà d'un succès.

Ceci dit, j'aime bien aussi vendre des copies, qu'on ne se méprenne pas!

P.S. : N'hésitez pas à commenter ce billet et, au besoin, à tempérer mes propos.

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